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La véronique de Perse, une plante comestible ?

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La Véronique de Perse (Veronica persica), aussi appelée véronique commune, est une plante annuelle qui appartient à la famille des Plantaginacées. Ses magnifiques fleurs apparaissent au tout début du printemps. Elle est largement répandue et est considérée comme une adventice (pour ne pas dire mauvaise herbe) dans de nombreux jardins.
Sa saveur âcre n’invite pas à en consommer de grandes quantités. Mais, comme vous, je me suis intéressé à la comestibilité de Veronica persica. C’est l’objet de cet article.

Présentation de la véronique de perse

Véronique de perse, comestible ou non

La véronique de Perse se caractérise par de petites fleurs solitaires de couleur bleu délavé. Ces fleurs possèdent quatre pétales soudés entre eux et seulement deux étamines, ce qui facilite l’identification du genre Veronica

La plante mesure de 10 à 40 cm. Elle est pubescente, et ses tiges sont couchées ou ascendantes. Ses feuilles inférieures sont opposées et les autres sont alternes. Elles sont courtement pétiolées ; de forme ovale en cœur et fortement dentées.

Bien que certaines espèces de véroniques aient été utilisées en médecine traditionnelle, la véronique de Perse semble être dépourvue de propriétés curatives notables.

Tige pubescente de la véronique de Perse

Quelques mots sur le genre Veronica

La véronique de Perse fait partie du genre Veronica qui comprend près de 450 espèces dans le monde, parmi lesquelles 30 sont indigènes en Europe tempérée.

Toutes les espèces de ce genre sont des plantes herbacées annuelles ou vivaces. Leurs feuilles sont toujours simples et sont en général opposées. Chez certaines espèces, elles sont toutefois alternes voire en rosette basale.

On reconnaît généralement assez facilement le genre des véroniques grâce à leurs fleurs caractéristiques :

Ces fleurs sont hermaphrodites et sont le plus souvent bleues (mais plus rarement blanchâtres à rose violacé). Elles ont 4 pétales soudés (rarement 5) ; 4 ou 5 sépales ainsi que 2 étamines. Les stries foncées sur les pétales fonctionnent comme des balises pour les insectes, elles indiquent la voie du nectar.

Il est toutefois plus difficile de distinguer une espèce d’une autre.

Le saviez-vous ? Les véroniques ont changé de famille…

Les véroniques faisaient autrefois partie du genre des Scrophulariacées. Depuis quelques années, grâce à la nouvelle classification phylogénétique, le genre Veronica a été déplacé chez les Plantaginacées qui comprenaient principalement les plantains. Aujourd’hui, les véroniques se retrouvent donc dans la même famille que les digitales ou les linaires qui faisaient elles aussi partie des Scrophulariacées. Il s’agit à présent d’une famille très variée avec des genres qui ont peu de caractères morphologiques en commun.

La véronique de Perse est-elle comestible ?

A priori, répondre à cette question est simple. La véronique de Perse n’est en effet pas à proprement parlé considérée comme une plante comestible. Elle a en réalité été très peu étudiée, mais on considère qu’elle n’est pas non plus toxique… Sinon, ça se saurait.

La plupart des ouvrages concernant les plantes sauvages comestibles ignorent tout simplement cette plante. Seul l’ouvrage Plantes sauvages comestibles écrit par Fleischhauer S.G. ; Guthmann J. ; Spiegelberger R. et publié en 2019 aux éditions Ulmer la décrit comme une plante comestible. Il n’est toutefois fait aucune mention de sa toxicité.

Gérard Ducerf indique quant à lui dans le premier tome sur les plantes bio-indicatrices qu’il s’agit d’une plante toxique réservée au corps médical et qu’il ne faut pas la consommer. On devrait donc s’intéresser aux constituants de Veronica persica.

Des recherches récentes nous éclairent sur les constituants de la véronique de Perse.

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Quelques recherches sur les constituants de la véronique officinale

Voici la traduction de la partie qui nous intéresse. Ne vous inquiétez pas si vous ne comprenez pas, Francis Collet va nous aider à y voir plus clair.

Dans les extraits de dichlorométhane de cette plante, la calendine (43), le tyrosol (44) et deux dérivés de l’acide benzoïque ont été isolés. De plus, dans les parties aériennes de V. persica, un nouveau glycoside phényléthanoïde, le persicoside (45), et trois glycosides de phényléthanoïde connus, l’acteoside (46), l’isoactéoside (47) et le lavandulifolioside (48) ont été isolés et la structure a été confirmée par des techniques spectroscopiques.

Constituants de la véronique de Perse
Phytoconstituants de la véronique de Perse (Veronica persica).

En plus des glycosides de phényléthanoïdes, l’hexitol, le dulcitol et sept glucosides iridoïdes connus, l’aucubine, le véronicoside, l’amphicoside, le 6-O-vératroyl-catalpol, le catalposide, le verproside et le verminoside ont été isolés de cette espèce végétale.

Les explications de Francis Collet

Francis Collet est enseignant agrégé de physique-chimie, enseignant de chimie au Collège Pratique d’Ethnobotanique ainsi qu’accompagnateur en montagne diplômé d’État. Si vous souhaitez participer à l’une de ses activités, c’est par ici !

La plante contient surtout des glycosides d’iridoïdes. Ce sont des monoterpènes caractérisés par un squelette cyclique d’iridane. Ces sont des composés qui interviennent dans les mécanismes de défense des fourmis et ils jouent un rôle dans les interactions plante-animal (Pharmacognosie, Bruneton). Ce sont en général des molécules actives, qui viennent interagir avec certaines enzymes. Des iridoïdes montrent une activité antibactérienne, d’autres insecticide ou antifongique, d’autres encore antioxydante ou anti-inflammatoire. L’aucuboside inhibe sélectivement, in vitro, le tromboxane synthase par exemple et agit ainsi comme anti-inflammatoire.

Représentation botanique de la véronique de Perse

Mais cela ne montre pas grand-chose, car il faut encore que la molécule puisse atteindre sa cible cellulaire dans l’organisme. Et il y a peu d’information sur la bio-biodisponibilité de telles molécules. Pour l’aucuboside, l’effet anti-inflammatoire est très marqué in vitro, il apparait que les effets sont mesurables en application locale, mais que par voie orale, il n’y aurait pas ou peu d’effets mesurables. Autrement dit ces iridoïdes n’atteindraient pas leur cible cellulaire lors d’une administration par voie orale.

On peut tout de même imaginer une possible interaction au niveau de nos muqueuses intestinales ? Le fait que Veronica persica, soit riche en molécules potentiellement actives (les iridoïdes), suffit à classer la plante comme médicinale avec des effets qui peuvent être négatifs pour notre santé en fonction de la dose. C’est à dire à la classer dans ce continuum, encadré à une extrémité par les plantes franchement toxiques et de l’autre, par les plantes comestibles. Pas étonnant donc que son classement (plantes toxiques/plantes comestibles) dépende des ouvrages.

La véronique de Perse, une plante à admirer

La plante contient en outre des flavonoïdes (de bons antioxydants, mais plus ou moins biodisponibles) et un peu de tanins. Personnellement, je ne la trouve pas très bonne au goût donc je ne la mange pas en quantité et ce n’est peut-être pas plus mal. Il y a bien d’autres plantes, excellentes au goût, et qui peuvent être classées, sans équivoque, dans les plantes comestibles, c’est-à-dire pouvant être ingérées en quantité. Je la regarde pousser et j’admire ces jolies fleurs bleues, mais je ne la cueille jamais pour la manger. Parfois, elle couvre littéralement une partie de mon jardin, car elle a développé une excellente stratégie pour coloniser les terres mises à nue et ça aussi c’est admirable, mais ça déprime le jardinier !

Merci infiniment à Francis Collet pour son analyse.

Pour résumer, il ne semble donc pas y avoir risques à ajouter quelques fleurs en décoration ou même quelques feuilles dans une salade. L’intérêt gustatif n’est toutefois pas évident. Leur saveur âcre pourrait vous rappeler le thé noir si vous la consommez en tisane. D’autres plantes sont plus abondantes et très appréciées. Alors, apprécions simplement la beauté de la véronique de Perse.

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Ressources utilisées pour rédiger cet article

-Merci à Francis Collet pour son aide. Consultez son site internet en cliquant ici.
-Fleischhauer S.G. ; Guthmann J. ; Spiegelberger R. (2019). Plantes sauvages comestibles. Ulmer, Paris, 248 p.
-https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6651156
-https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29981683/
-https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/10856638/

Yvann Robinet
Yvann Robinethttps://bosquetsauvage.com
Je souhaite transmettre mes connaissances relatives aux plantes, partager mon intérêt pour l'autonomie et le développement de soi, promouvoir la connexion entre l'humanité et le monde naturel, remettre au goût du jour les mythes, les contes et les traditions anciennes. Actuellement élève de deuxième année au Collège Pratique d'Ethnobotanique (créé par François Couplan), je proposerai prochainement des activités sur le terrain dans le massif des Ardennes. Je vous en parle bientôt...

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